Le 18 Novembre 2011, 20h13

Il est d'événements inattendus qui nous font rendre compte de notre stupidité. Ainsi, j'ai lu
Les Faux-Monnayeurs de Gide. Eu-je crû alors être tombé de si haut que je crus ne jamais pouvoir me relever ? Cela va sans dire, j'ai été touché. J'ai été assailli par cette multitude profonde et transversale de pensées. J'ai vu plus qu'un roman pur dans ce livre. J'y ai vu la livraison complète et intime d'une vision de la vie. J'ai compris que personne ne la percevait de la même façon. Que personne n'était « un », mais que tout le monde était « le ».


Je vois en rougissant, et j'ai bien peur, de répéter tout ce qui a déjà été dit par cette multitude de personne qui avant ma naissance surpassaient déjà mon orgueil. J'ai cru comprendre ce qu'était la littérature, ce qu'était l'art, ce qu'était la vie, avant même d'avoir compris comment admirer toutes ces choses. Maintenant, je n'aurais plus cette prétention. Je serai humble et comprendrait que, loin d'être en connaissance de tout, je serai en connaissance d'un tout.

Ce que je voudrais, c'est aiguiser ma perception, c'est apprendre à comprendre en sentant. Cela éclos enfin en moi, j'arrive à exprimer ce sentiment, ce désir qui me dévorait depuis plus d'un an : le désir d'observer. Pas les faits de sciences et d'actualités, non. Mais d'observer la vie. J'avais déjà sans me le dire le pressentiment que cela ne pouvait se faire que par l'art. En regardant Elephant, l'an dernier, j'avais cru entrevoir une vision du monde. Dans l'objectif de la caméra, mon œil suivait furtivement le dos de ces individus perdus dans les couloirs du lycée, dans le dédale de la vie. En lisant le roman de Gide, j'ai vu dans l'œil d'un dieu tous les possibles du réel.

Serait-ce alors cela ? Comprendre la vie, ce serait comprendre ses possibles ? Je ne reste pas passif observateur, ça non. Mais je voudrais regarder et comprendre chaque corps, chaque idée, et chaque lien qui les unit. Et si un jour je les comprends, essayer de les écrire, ou de les former en image, de faire un film.

Je me suis nourris des espoirs de Bernard, d'Olivier. Je me suis retrouvé dans des pensées d'Armand, d'Édouard. Je crois que j'aime Gide, il faudrait que je le lise mieux. En attendant, j'ai retrouvé, en partie grâce à cette lecture, l'espoir. J'ai redécouvert le fait que la vie ne se résumait pas à un boulot et une vie de famille, mais que quelque chose de bien plus profond s'y passait en chacun de nous.
Velléité.

Rémy.